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Le retard de la culture du marketing au Québec


Depuis quelques années, j’avais l’impression que les émissions offertes sur les chaines anglophones généralistes au Canada comportaient plus d’émissions à caractère d’affaires ou de mise en marché.

Nous avons bien eu au Québec quelques émissions d’affaires : le canal argent et la nouvelle émission à V télé pour les entrepreneurs, mais rien d’aussi général que ce qui est offert dans les réseaux anglophones.

Lors de ma dernière mission aux États-Unis, j’ai pris la peine de syntoniser CBC, la radio anglophone de notre diffuseur canadien, avant de traverser les lignes. Comme j’habite Rivière-du-Loup et auparavant Roberval, au Lac-Saint-Jean, je n’ai pas souvent accès à cette station radio dans mon auto.

Je suis tombé sur une très belle émission qui s’intitulait « The Age of Persuasion »  qui nous parlait des « Speed bump » en marketing.  Je prendrai quelques lignes pour vous en parler à la fin de l’article, le concept est très intéressant.

Quelle ne fut pas ma surprise de voir un livre intitulé « The age of persuasion » sur les tablettes du Chapters lors de ma visite à Moncton! Je l’ai acheté tout de suite. L’important ici est de constater que je n’avais pas entendu parler de ce livre ni de l’émission, même si je tente de me tenir informé des découvertes marketing.

Que ce soit au Barnes & Nobles, au Chapters ou dans d’autres bibliothèques que j’ai visité aux États-Unis ou à Moncton, il y a toujours 2-3 sections de bibliothèque pour les livres d’administration. On divise les livres entre économie, management, marketing, vente, publicité, investissement. Bref, non seulement il y a beaucoup de livres, mais ils sont classés!

J’ai vu plusieurs dizaines de livres différents sur le marketing avec Google, Facebook, Twitter, YouTube, le marketing viral, les réseaux sociaux, le marketing par courriel. Pour tous les goûts et par de nombreux écrivains différents. Cette diversité d’offre permet de faire en sorte que d’excellentes méthodes de fonctionnement seront forcément véhiculées.

Au Québec, on peut trouver une dizaine de livres sur les réseaux sociaux ou le marketing avec Internet. Luc Dupont, Michèle Blanc, Raymond Morin et Sylvie Bédard sont les auteurs que j’ai achetés. Dans une petite librairie de quartier ou dans des villes de moins de 50 000 habitants, le choix ne sera pas toujours là.

Peu de traduction

En général, lorsque l’on trouve un roman intéressant ou un essai, il sera probablement traduit dans certaines langues. Pour les livres de marketing, je ne vois pas souvent de traduction. Forcément, il n’y a pas de marché, car il n’y a pas de culture de base en marketing. Pas de culture de masse = pas de vente, pas de vente = pas d’offre, pas d’offre = pas d’amélioration de la culture. C’est un cercle vicieux.

C’est comme si le marketing était considéré comme peu important, même pour les gens d’affaires.

Et puis la formation?

La conséquence de cette offre peu diversifiée?

Un retard dans les formations des futurs diplômés et des entrepreneurs actuels.

Si vous provenez de Montréal ou si vous êtes familier avec la lecture de l’anglais, cette absence d’offre ne vous est pas trop dommageable. Il est toujours possible de commander les livres par Internet si vous en avez le goût.

Par contre, il en est tout autrement si vous habitez en région ou si vous n’êtes pas bilingue. De plus, nombre de nos universités ou Cégep vont privilégier les livres en français pour les cours. Cela veut dire que les étudiants n’auront pas accès aux dernières découvertes ou avancées dans ce domaine.

Pour une formation personnalisée en marketing que je suis en train de préparer pour une entreprise du Bas-Saint-Laurent, J’ai la possibilité de prendre de la matière dans 5 livres anglais et dans  3 livres français, dont une traduction. Ceux qui vont suivre la formation ne pourront lire au complet les livres. Quelques sections importantes seront traduites de manière artisanale de ma part, mais cela ne pourra jamais remplacer l’ensemble de l’œuvre.

De quelle manière est-ce que vous croyez que ce retard en culture marketing vous affecte?

Les « Speed Bump » ou dos d’âne

Terry O’Reilly en est à sa 5e saison pour cette émission de la CBC Radio, the Age of Persuasion. Dans l’épisode que j’ai écouté : « Speed Bumps, the magical ingredient in marketing », il était question d’une technique intéressante qui permet d’augmenter la confiance de l’acheteur.

Voici un premier exemple : quand Clairol a introduit son nouveau « Revitalisant » dans les années 70, ils voulaient lui donner la crédibilité des salons de coiffure.

En lisant les instructions, il faut mouiller les cheveux, appliquer le revitalisant et attendre 30 minutes puis rincer.

Il est important de noter que le produit avait agi en moins de 2 minutes. Par contre, les clientes étaient habituées depuis des années à attendre 30 minutes sous l’aérateur dans les salons de coiffure. Un bon produit ne pouvait donc pas faire effet en seulement 2 minutes. Clairol a donc ajouté l’inconvénient de demeurer assis sans rien faire pendant 30 minutes afin d’obtenir de meilleures ventes.

Un autre exemple qui provient de All Marketers Are Liars : Pour les parents consciencieux, un bon repas, c’est un repas qui est cuit à la maison.  En fait, c’est un repas santé et les repas santé procurent du plaisir et du bien-être pour toute la famille. Ces parents n’achètent donc pas de repas surgelés ou de repas précuits.

Pour faciliter la tâche des parents et quand même vendre un produit transformé, Banquet (qui est détenu par ConAgra) vend une préparation pour les mijoteuses qui permet de donner cette illusion. Ils auraient très bien pu cuire en usine la préparation et l’offrir en boite prêt au four micro-onde en 5 minutes. Mais d’ajouter une journée de cuisson dans une mijoteuse rend tout d’un coup ce produit vraiment intéressant.

Dernier exemple : les préparations à gâteau Betty Crocker. Quand ils ont introduit la première version des préparations pour gâteau, il suffisait d’ajouter de l’eau et de mélanger. Parfait, le plus rapide et le plus simple possible.

Les ventes étaient anémiques, les gens n’en voulaient pas.

Les mamans ne pouvaient croire qu’un mélange si simple pouvait produire un gâteau bon pour la santé. Il paraissait trop « chimique » pour les clients. Ils ont donc ajouté un facteur de ralentissement.

Ils ont modifié la formule pour que l’on ajoute 1 œuf, de l’huile et du lait.

Avec ce petit changement de technique, ils ont pu augmenter dramatiquement les ventes de ce mélange.

Est-ce que votre service pourrait bénéficier d’un « facteur de ralentissement »?

  1. 20 février 2011 à 11 h 50 min

    Allo Pascal,

    réflexion intéressante, ma femme a une petite librairie et je lui achète des bouquins spécialisés sur le sujet. C’est vrai qu’il y a plusieurs bouquin non traduit.
    Pour mettre mon grain de sel sur le sujet, je suis d’accord lorsque tu dis:
    « C’est comme si le marketing était considéré comme peu important, même pour les gens d’affaires. »
    Nous avons au Québec un passé et une culture qui nous rapproche plus de l’agriculture que de la production manufacturière et qui nous éloigne du marketing et de la vente. Et qui dit marketing dit vente, parce qu’au bout du compte, l’objectif du marketing est de faire sonner la caisse. Et au Québec, être vendeur et avoir la peste bubonnique sonne à peu près pareil. Notre économie est organisé pour favorisé les entreprise manufacturières. Aide financière, crédit d’impôt, achat d’équipement, etc. Tout ce qui touche l’augmentation de la capacité de production est facilement finançable (achat d’équipement). On ouvre une usine de fabrication mais il n’y a souvent pas beaucoup de réflexion sur « qui va acheter notre produit » et surtout presque aucune aide financière pour monter une stratégie de commercialisation. Et c’est ça le plus important, même si tu produit 100 tartes aux fraise / minutes, si tu en vends pas, tu n’iras pas loin. Il y a pour moi une sur-valorisation du travail de manufacturier et une sous-valorisation du travail de vendeur appuyé par un bon plan de marketing. Produisons, produisons mais sous-traitons la commercialisation à d’autres. Un plan un peu boîteux pour moi. Les entreprises performantes sous-traitent la production, pondent un plan de marketing solide, consolide la marque de commerce et l’image des produits, s’engage des Jean-Marc Chaput et des Guy Bourgeois, et parachutes les vendeurs avec le couteau entre les dents, sur leur marché cible. Mais on dirait que cette approche est moins sexy au Québec, c’est peut-être pour ça qu’on en parle moins.

    Dany

    • 21 février 2011 à 3 h 30 min

      Au Québec, on tend à associer fortement le marketing à la publicité alors que ce n’est qu’une partie du marketing. Il y a même des entreprises qui font un travail remarquable sans recourir à la publicité.

      Dans mon entreprise, je me sert du marketing pour être en mesure de développer mes produits en fonction de ce que la clientèle veut. J’anticipe les problèmes à l’utilisation et à l’expédition. Surtout, je m’efforce d’améliorer le produit pour que mes clients deviennent mes meilleurs vendeurs.

      Merci beaucoup pour le commentaire!

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